(Backstage #10) Bourrés à Bakersfield

Coucher de soleil sur la route en Californie

Backstage : ces photos de road trip qui ne racontent pas toute l’histoire
On revient toujours de vacances avec de belles photos comme des trophées des aventures passées. Mais derrière certaines photos, il y a parfois des histoires pas toujours très glamour, parfois marrantes, parfois gênantes, ou complètement flippantes. Et ce sont finalement souvent les meilleurs souvenirs de voyage, ceux qui restent et qu’on adore raconter. Pendant tout le mois d’août, du lundi au vendredi, retrouvez une de ces histoires « backstage ».

Backstage, épisode 10
Bourrés à Bakersfield

☞ La photo ci-dessus nous montre la route aux Etats-Unis au coucher du soleil, mais au-delà du cliché on ne sait pas où on dort ce soir-là, et surtout, on est affamé dans la voiture après une longue journée de route.

Quand : septembre 2012
Lieu : à Bakersfield, en Californie
L’article de blog : Sur la route de l’arrière-pays californien

J’ai déjà raconté cette anecdote sur le blog il y a quelques années, je la publie à nouveau en la modifiant, parce qu’elle correspond parfaitement au sujet de cette série Backstage. C’est un épisode de mon tout premier road trip aux Etats-Unis en 2012, on était parti avec des copains venus de Paris pour une boucle de 15 jours d’un parcours classique au départ de San Francisco et pour traverser les parcs principaux de Californie et d’Arizona. On avait tout bien préparé à l’avance – ce qu’on ne fait plus aujourd’hui, ou du moins pas de la même façon – sauf une seule nuit : on s’était dit que ce serait l’aventure ! Voilà à quoi ressemblait notre première soirée et nuit sans planification, en bons débutants en road trip.

On a roulé toute la journée depuis l’Utah : une douzaine d’heures de route, la clim dans la voiture ne suffit pas à atténuer la chaleur qui tape contre les fenêtres. Dans les stations essence, les tongs collent au bitume élastique. On écoute de la musique, on somnole, on discute, on fait des jeux dans la voiture.

C’est le premier soir du voyage où on ne sait pas où on dort : tout a été bien prévu à l’avance, sauf une nuit, pour se donner le frisson de la liberté. La ville qui tombe pile sur notre trajet avant d’arriver à notre prochaine étape, Big Sur, s’appelle Bakersfield.

Le soir venu, la couleur dorée des collines est magnifique, c’est la fin de l’été ; dehors, tout est sec, on aperçoit au loin des derricks qui pompent du pétrole. Dans le guide, un resto basque est chaudement recommandé. Ça peut sembler étonnant au milieu de l’arrière-pays californien de trouver ce type de resto, mais il y a eu toute une immigration basque au début du 20è siècle, et les gens sont restés. En arrivant à Bakersfield, on est loin de l’ambiance Saint-Jean-de-Luz, ça rappelle plutôt un début de film glauque : des terrains vagues, des voitures à la casse derrière un grillage fin, gardée par des gros chiens qui aboient. « Euh, t’es sûr qu’on s’arrête ici, ça a pas l’air génial ? » C’est à ce moment-là que Manu s’est souvenu du conseil de son copain Dan, qui vit en Californie depuis quelques années : « Surtout, n’allez pas à Bakersfield. »

On a faim, on s’installe malgré tout au resto, qui a une grande salle commune derrière un bar où est servi un repas de groupe sur de grandes tables collectives. Le dîner a lieu tous les soirs à heure fixe, de 19 à 20 heures, on arrive un peu après le début, mais on nous laisse nous asseoir malgré tout. C’est convivial et un peu Village people sur les bords avec le pompier et le policier à table. La proprio, d’origine basque mais qui ne sait plus très bien parler français (après des décennies aux USA, on l’excuse), nous sert des plats délicieux qui s’enchaînent, sans aucun rapport les uns avec les autres : poulet basquaise, puis steak-frites, puis d’autres plats dont je ne me souviens plus, car le tout est arrosé copieusement d’une piquette pas géniale, servie en carafe. A la fin du repas, quand tout le monde est parti – les Américains, en général, ont tendance à sortir vite de table, on reste seuls à discuter avec elle ; elle rassemble toutes les carafes des deux tables et nous sert le vin restant : « Vous êtes français, vous aimez bien boire ». On discute de notre voyage dans l’ouest américain, encore émerveillés d’avoir vu le Grand Canyon, Zion et Bryce, mais elle nous dit qu’il n’y a qu’un endroit où elle aime retourner : Las Vegas.

On fait une petite photo avec notre nouvelle amie avant de partir, et elle nous recommande un super motel pour passer la nuit, pas cher du tout nous dit-elle. Manu n’a pas bu, il est notre « conducteur designé » comme on dit ici, et a la patience de nous amener au motel, alors qu’on chante à tue-tête, vitres baissées sur la route, vers ce que la serveuse nous a présenté comme « le meilleur motel de la région ».

Léo et moi sommes émerveillées par la piscine, qui est fermée à cette heure tardive (cf. article sur les horaires toujours très tôt dans les coins paumés), et encouragées par le taux d’alcoolémie, on essaie d’y aller quand même. Les souvenirs deviennent flous.

Le lendemain, la piscine a juste l’air d’une pataugeoire encerclée de grillage, et Léo et Pierre ont eu droit à des cafards dans leur chambre ; on se prend un petit déjeuner très rapide, café et muffin sous plastique.

C’était pas génial, mais ça reste un excellent souvenir.

Motel pourri a Bakersfield
▶ Rendez-vous demain pour l’épisode 11 de la série Backstage où je vous raconterai le jour où m’a joué du pipeau au fond d’un canyon
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Mathilde

Mathilde

Rédactrice, grande organisatrice et réseau socialite du Blog de Mathilde. Je vis à Boston depuis 2012, j'ai fondé (puis vendu) une entreprise de visites guidées en français de la ville, Boston le nez en l'air. Je suis aussi autrice de nombreux guides de voyages, de livres de yoga et de jeux chez des éditeurs français. Suivez-moi sur Instagram !

7 réflexions au sujet de “(Backstage #10) Bourrés à Bakersfield

  1. Haha très drôle cette anecdote! Nous aussi lors de notre road-trip californien, on nous a déconseillé Bakersfield, c’est si horrible que ça?!

  2. Je me souviens avoir étape dans ce Vagabond Inn. Je faisais étape entre Sequoia National Park et Hearst Castle.
    Ces chaînes de Motel sont toutes plus sinistres les unes que les autres, et c’est à qui aura la pire insonorisation!

  3. Cette anecdote me fait penser à la nuit que nous avons passé à Blanding lors de notre road trip dans l’Utah. J’avais réservé un motel pas noté tip top mais ce n’était que pour une une nuit le long du trajet. Ledit motel était plus que glauque. Nous avons été accueillis par un salarié cadavérique à l’accueil. Il paraissait drogué et / ou gravement malade,au choix. Bon, pas grave, on prend notre clé et basta. Euh, non, en fait, l’enfer commençait. La chambre qui nous a été attribuée était tellement pourrie et sale (je ne parle même pas de la salle de bain) que nous avons tenté de trouver une chambre dans un autre motel mais ils étaient tous complets. Nous avons réellement hésité à dormir dans la voiture. Pour passer le temps, nous avons fait un tour à pied dans le « centre ville ». Les flics nous ont pistés un instant certainement surpris que des touristes se promènent à pied! Tu m’étonnes! Nous avons vite compris qu’il y avait 2 zones dans la ville et, dans la partie la plus populaire, il y avait des chiens peu enclins à nous faire des câlins… Rapide 1/2 tour. Nous avons croisé un 4×4 qui polluait à tout va, j’ai découvert le « rolling coal ». Hallucinant, j’ai voulu prendre une photo : mauvaise idée, pas de photo! Nous sommes rentrés au motel faute de mieux. Nuit horrible dans la chambre et à l’extérieur (bagarres, insultes, cris…). Dès l’aube, nous avons ouvert la porte de la chambre pour faire entrer la lumière et là, une scène surréaliste : un gars (c’était en fait le salarié du motel qui prenait son poste – pas le même que la veille) s’est planté devant notre chambre, il nous a dit « bonjour » en français puis a tenu des propos incompréhensibles. Il était complètement défoncé et avait une bande ensanglantée qui entourait sa main. Pourquoi m’a t-il dit bonjour en français alors même que nous ne l’avions jamais croisé? ça se voit à ma tête que je suis française?! Peut être écoutait-il derrière la porte? Flippant! Méga flippant! J’ai fermé la porte apeurée et nous avons vite pris la route. Ce fût la pire nuit de road trip et pour autant, elle fait partie de nos souvenirs de voyage même si je n’envisage pas de renouveler. Je testerai plutôt le camping la prochaine fois…

  4. Des vrais souvenirs de vacances (bien qu’un peu embrumés ;-))!
    j’ai toujours du mal à imaginer qu’on puisse oublier sa langue maternelle!

    nous aussi on s’est arrêté à Bakersfield lors d’un road trip à l’ouest…pourquoi? pcq il fallait un point de chute entre 2 étapes cools (et quand on connaît pas on prend ce qu’il y a sur la carte). souvenirs: un fast food, une station essence et un motel pourri (le tout de nuit)!

    merci pour cette super série de l’été!

    • Bakersfield est en effet une étape pratique et parfois indispensable en effet !
      Je vis aux USA depuis bientôt 6 ans, rien par rapport à cette dame, mais parfois c’est plus simple de penser en anglais, petit à petit, certains mots ou expressions semblent plus simples à dire en anglais – d’où ce franglais dégueulasse et qui peut sembler snob quand on rentre en France !!

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